« Nous censurerons un gouvernement PS qui enverrait immanquablement la France au tapis »
Après les propos de Laurent Wauquiez, qui ont suscité un tollé à droite, François-Xavier Bellamy, numéro deux du parti LR et vice-président délégué des Républicains, réaffirme l’écart qui sépare la droite de la gauche sur la sécurité, l’immigration, l’école, et bien sûr le budget.
Laurent Wauquiez a déclaré jeudi qu’il ne censurerait pas a priori un gouvernement socialiste. Partagez-vous ce propos ?
Les Républicains sont entrés au gouvernement, après la dissolution, non pour rejoindre le macronisme auxquels nous nous sommes opposés sans relâche, ni pour des postes ou des places, mais pour une seule et unique raison : empêcher que la gauche n’arrive au pouvoir. Notre responsabilité reste d’éviter au pays ce scénario désastreux, qui sans nous serait inévitable.
Pourquoi alors Laurent Wauquiez a-t-il dit cela ? Est-ce pour mettre en difficulté Bruno Retailleau ?
Laurent Wauquiez a voulu montrer que nous ne sommes pas les artificiers de l’instabilité gouvernementale. Oui, la France a besoin de stabilité ; mais pas à n’importe quelles conditions. La ligne du PS, dont les députés ont été élus avec les voix de LFI, est le contraire absolu de ce que nous voulons pour la France, sur la sécurité, l’immigration, l’école, et bien sûr le budget, comme l’a montré le projet récemment diffusé par les socialistes : des dizaines de milliards de dépenses et de taxes supplémentaires, au moment où la France est déjà au bord de l’effondrement… Quand le bateau prend l’eau de toutes parts, le PS veut descendre dans la soute avec une hache pour élargir les brèches. Nous ne laisserons pas faire.
N’y a-t-il rien à retenir dans le contre-budget des socialistes ?
Ce contre-budget délirant a un grand mérite : il montre l’ampleur du déni de réalité qui a conduit le pays au surendettement, et qui accélérera la faillite si les socialistes gouvernent. Bruno Retailleau l’a dit clairement : notre première responsabilité est d’abord d’éviter le pire au pays ; et nous censurerons donc un gouvernement PS, qui enverrait immanquablement la France au tapis.
Alors que le vote de confiance lundi devrait précipiter la chute de François Bayrou, les LR doivent-ils rester au gouvernement ?
Pas à n’importe quelles conditions bien sûr. Dans ce contexte de crise, notre famille politique doit continuer de protéger le pays d’une prise de pouvoir de la gauche. Mais soyons lucides : pour mener la politique que nous voulons, il faudra retrouver une majorité claire. Notre premier devoir reste donc de préparer l’alternance, et de rendre aux Français l’espérance du changement profond dont le pays a besoin.
Emmanuel Macron doit-il démissionner ?
Cette question ne peut appartenir qu’au président de la République. Le général de Gaulle a démissionné pour avoir perdu un référendum sur la régionalisation ; d’autres présidents ont été minoritaires sans le suivre pour autant, par exemple en temps de cohabitation. Une chose est sûre : seule l’élection présidentielle apportera le moment de vérité démocratique qui permettra l’alternance.
Le RN caracole dans les sondages. Vos électeurs ont-ils la tentation de le rejoindre ?
Je n’ai jamais cru au rêve du « en même temps », qui a fini par conduire au chaos actuel. Face à une gauche qui se radicalise, nous devons reconstruire une droite qui s’assume. Marine Le Pen refuse, comme Emmanuel Macron, de reconnaître ce clivage : c’est son droit bien sûr, mais je crois profondément que ce choix ne permettra jamais l’alternance. Le RN est-il le meilleur rempart face à la gauche ? Il en reprend presque tout le programme économique et budgétaire. Et sur les questions régaliennes, il a permis que Richard Ferrand, un ancien socialiste, prenne la tête du Conseil constitutionnel, avec les conséquences qu’on connaît…
Les Républicains doivent-ils craindre un choc des ambitions en vue de 2027 entre Laurent Wauquiez et Bruno Retailleau ?
L’élection interne a eu lieu ; on nous prédisait un nouvel affrontement, elle a permis un vrai débat, un choix clair, un nouvel élan. Il y a maintenant un capitaine à bord, et un travail commun pour reconstruire. Je crois que nous avons une responsabilité collective : le monde politique et médiatique devrait passer bien moins de temps à spéculer sur les trajectoires individuelles, et bien plus à parler de la réalité des problèmes que les Français affrontent tous les jours… Sans quoi la vie publique finira de les écœurer, à raison.
Cette semaine dans Le Figaro, Nicolas Sarkozy prône l’abstention sur le vote de confiance, évoque la possibilité d’une majorité RN et défend la nécessité d’une primaire pour choisir le candidat de la droite en 2027. Quel est votre avis sur ces points ?
Toutes ces questions me semblent être d’abord le symptôme d’un même problème : il n’existe nulle part encore de projet politique suffisamment fort pour susciter un espoir chez une majorité de Français, qui pourtant l’attendent. C’est à cela que je veux travailler en secondant Bruno Retailleau à la tête de LR. Nous avons deux ans pour créer l’élan qui s’imposera comme une nécessité pour le relèvement du pays.
Lors de vos échanges avec François Bayrou cette semaine avec le président LR et les autres chefs de groupe, comment l’avez-vous perçu ?
Il nous a partagé son message d’inquiétude sur l’état des finances publiques. Nous le partageons d’autant plus que nous sommes la seule famille politique à n’avoir jamais cessé d’alerter sur le danger existentiel que constitue depuis trop longtemps la trajectoire budgétaire du pays. Mais nous sommes en désaccord avec le premier ministre sur les remèdes à apporter. La France qui travaille et qui paye déjà tellement ne peut pas payer encore plus pour éviter le naufrage d’un système dysfonctionnel. Ce qui compte, c’est de changer ce système. Le problème n’est pas que l’État n’a pas assez de recettes, mais qu’il doit enfin baisser fortement ses dépenses, et en particulier sortir de ce « modèle antisocial » qui a fini par asphyxier le travail sous le poids de la fiscalité.
La reconstruction du parti LR est-elle lancée ?
Ce congrès sera l’occasion d’une refonte intégrale des statuts. Ils seront à la fois plus lisibles, transparents et démocratiques. La promesse de Bruno Retailleau était de rendre le parti à ses adhérents et ces nouveaux statuts le permettront de manière concrète, par exemple en leur confiant la capacité de trancher la désignation du candidat à la présidentielle, ou en ouvrant la possibilité nouvelle de référendums internes réguliers.
Quels seront les principaux messages politiques de Port-Marly ?
Ce congrès montrera l’élan retrouvé : les turbulences actuelles ne doivent pas faire oublier que LR est redevenu le premier parti de France en nombre d’adhérents. Nous sommes en train de nous reconstruire, et nous voulons nous imposer une exigence de vérité et de sérieux, au moment où la politique s’abîme dans l’absurde et le dérisoire. C’est de cette voie que le pays aura besoin dans les mois et les années qui viennent.
Le discours de Bruno Retailleau est attendu dimanche comme le point d’orgue de votre rentrée. Comment le chef des LR appréhende-t-il ce moment ?
Bruno Retailleau aborde ce moment avec beaucoup de gravité. Devant nous, il y a le 8 septembre mais aussi les blocages instrumentalisés par LFI le 10, le verdict des agences de notation le 12… Les temps vont imposer du sang froid et du courage.
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