Dans une interview à L’Obs, Elsa Schalck, sénatrice du Bas-Rhin, conseillère municipale et membre de l’Eurométropole de Strasbourg, revient sur le report de la mise en place des zones à faibles émissions en 2030.
Par un amendement au projet de loi Climat, le Sénat a reporté à 2030 contre 2025 à l’origine – l’instauration obligatoire dans les grandes agglomérations de zones à faibles émissions (ZFE), d’où seront exclus les véhicules les plus polluants. Pourquoi ?
Pour permettre une souplesse clans les restrictions de circulation et laisser aux alternatives le temps de se développer. Il s’agit de rendre acceptables ces mesures pour les personnes qui possèdent une voiture et devront en changer. Prenez l’exemple de la métropole de Strasbourg : elle souhaitait interdire dès 2028 la circulation de tous les modèles diesel, interdisant brutalement la présence de 180 000 véhicules. Il est bien entendu nécessaire de réduire la pollution atmosphérique, et nous ne sommes évidemment pas hostiles au principe des zones à faibles émissions. Mais attention aux modalités il ne faut pas que la mise en place soit punitive pour nos concitoyens. Le maire d’Illkirch-Graffenstaden (Bas-Rhin), par exemple, organise le 11 juillet un référendum local sur le sujet, c’est une bonne idée. Nous voulons laisser du temps au temps, ce que permettrait un décalage à 2030.
Comment éviter que ces zones discriminent ceux qui habitent hors des centres-villes ou n’ont pas les moyens de changer de voiture ?
Je crois important, pour ce faire, que ce déploiement soit progressif et modulé. C’est pourquoi, au Sénat, nous avons voté des dérogations : des véhicules pourraient accéder à une ZFE en cas de motifs impérieux, comme aller au tribunal, à un centre de contrôle technique ou pour raisons de santé, par exemple. Il faut conserver ces marges de souplesse. Des réseaux de tramways, de pistes cyclables, parmi les alternatives, se mettent en place, mais il convient de laisser le temps pour que ces offres se développent. Et elles ne peuvent pas toujours remplacer le véhicule individuel. Aussi avons-nous créé un prêt à taux zéro destiné à aider les ménages les plus précaires à renouveler leur véhicule.
Quelles réactions percevez-vous sur le terrain concernant ces futures restrictions ?
La prise de conscience est encore faible, mais à mesure que les gens sont informés nous voyons monter de fortes inquiétudes. C’est pourquoi ce changement majeur ne doit pas être précipité. Pour une réforme aussi importante, qui touche à un point capital de la vie de nos concitoyens, l’Etat et les collectivités ont un rôle essentiel à jouer, en prenant le temps d’élaborer des modalités d’application réalistes. Le changement ne se décrète pas du jour au lendemain : accompagnons-le au lieu d’adopter un calendrier trop serré.